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Le stress chez les animaux d’élevage : concept et effets sur la production

Déborah Temple, Eva Mainau, Xavier Manteca

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Le terme de “stress” a largement été utilisé en biologie pour décrire un ensemble de changements physiologiques et de comportements découlant d’un stimulus aversif. En 1929, cannon a décrit le stress comme étant la tentative du système médullaire sympatho-adrénal (SAM) de réguler l’homéostasie quand l’animal est confronté à un stimulus aversif. Plus tard, dans une de ses études classiques sur la réponse de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS) aux stimuli nocifs, selye suggéra que l’organisme réagit de manière non-spécifique à une grande variété de stimuli aversifs, principalement en augmentant l’activité de l’axe HHS

VOIES IMPLIQUÉES

On considère généralement que l’axe hhs et le système sam sont les deux éléments fondamentaux de la réponse au stress, et la concentration plasmatique de glucocorticoïdes a très souvent été utilisée pour mesurer le stress. Le problème de cette approche est que l’axe hhs et le système sam ont une fonction cruciale dans la mobilisation de l’énergie et dans la redistribution des nutriments vers les tissus actifs. Les situations aversives (par exemple : les bagarres) tout comme celles qui sont gratifiantes (par exemple : la reproduction et l’accouplement) peuvent donc provoquer des réponses physiologiques de stress similaires. Si on considère que le stress est potentiellement négatif, il peut donc être trompeur de considérer qu’il est synonyme d’activation de l’axe HHS.

D’autre part, il y a aujourd’hui suffisamment d’évidences prouvant que les conséquences négatives qu’un stimulus aversif peut produire sur un animal ne dépendent pas de la nature physique de ce stimulus, mais bien plutôt de la mesure en laquelle l’animal peut le prévoir et le contrôler. Conséquemment, il a été suggéré que le terme “stress” ne soit utilisé que quand l’animal est confronté à une situation qui excède la capacité de régulation de son organisme, spécialement quand cette situation implique un certain degré d’imprévisibilité et de manque de contrôle.

La recherche scientifique sur le stress a plus récemment abordé le rôle du cerveau dans la réponse au stress. Différentes aires cérébrales sont impliquées dans l’organisation des réponses aux stimuli aversifs ou menaçants, et ces aires interagissent largement entre elles. Les neurones hypothalamiques, par exemple, sont sensibles aux stimuli physico-chimiques internes, aux stimuli physiques externes et aux stimuli psycho-sociaux. La réponse de stress est immédiate dans une large mesure en raison du facteur de libération de corticotrophine (CRF), sécrété principalement par le noyau paraventriculaire de l’hypothalamus.

FACTEURS DE STRESS

Les facteurs de stress peuvent être divisés en facteurs physiques, facteurs sociaux (résultants de l’interaction entre individus de la même espèce) et facteurs liés aux pratiques d’élevage. Les facteurs de stress ont aussi un effet additif. Cela signifie que quand différents facteurs stressants ont une incidence au même moment sur l’animal, la réponse de stress est plus grande que si l’animal avait été exposé à un seul facteur stressant. Des situations comme le sevrage et le transport peuvent ainsi être spécialement difficiles pour les animaux.

COMMENT LE STRESS PEUT-IL AFFECTER LES PERFORMANCES ZOOTECHNIQUES?

La réponse de stress induit différents changements qui peuvent avoir des effets négatifs sur les performances zootechniques. Ces effets incluent entre autres des changements dans la fonction immune et l’augmentation conséquente de la sensibilité aux maladies, la réduction de l’ingestion et de la rumination, l’inhibition de la libération d’ocytocine et la réduction de la fertilité. Dans cette fiche technique seront abordés l’effet du stress sur la sensibilité aux maladies, sur l’ingestion et sur la rumination.

FONCTION IMMUNE ET SENSIBILITÉ AUX MALADIES

Le stress peut inhiber le fonction immune. Cependant, les mécanismes responsables de l’effet de stress chronique sur le système immunitaire sont spécifiques et n’affectent que certains types de défense contre les maladies. Quand la réponse au stress implique la libération de glucocorticoïdes ou de catécholamines, la réponse immune cellulaire est inhibée. En pratique, cela signifie que certaines pathologies sont plus susceptibles d’être accentuées par le stress chronique que d’autres. Parmi ces pathologies, on trouve les maladies respiratoires infectieuses et l’infection par salmonella sp. De plus, il a été démontré que le stress durant le transport augmente l’incidence de pneumonie causée par pasteurella sp. augmentant ainsi la mortalité chez les bovins et les ovins ; il en est de même pour la salmonellose chez les ovins et les chevaux.

Les situations potentiellement stressantes peuvent aussi avoir pour conséquence d’augmenter la sensibilité à d’autres maladies. Par exemple, plusieurs études ont démontré qu’une augmentation de la prévalence de mammites chez les vaches laitières était due à de la peur chronique. Même si l’on ne connaît pas le mécanisme précis expliquant ce fait, on a suggéré que la fonction des cellules nkc (“natural killer cells”) pourrait se voir affectée par le stress et ce qui pourrait conduire à son tour à une augmentation de la sensibilité de la glande mammaire aux agents infectieux.

De même, on sait que le stress pendant le sevrage augmente le risque de maladies digestives chez plusieurs espèces.

INGESTION ET RUMINATION

L’effet négatif du stress sur l’ingestion a été reconnu bien que les changements précis impliqués soient encore objets de débat. Il est malgré tout très probable que l’effet inhibiteur du stress sur l’appétit soit conséquence d’une complexe interaction entre les glucocorticoïdes, la leptine et le CRF.

Il y a des évidences suggérant que le stress a un effet inhibiteur sur la rumination et que cela, à son tour, peut réduire la digestibilité des aliments et, conséquemment, affecte la production, tout en augmentant le risque d’acidose ruminale. On ne connaît pas précisément le mécanisme sous-jacent aux effets du stress sur la rumination, mais il est intéressant de remarquer que l’activité du cerveau pendant la rumination est similaire à celle du rêve et on sait que le stress peut rendre le rêve difficile.

RÉSUMÉ

Les deux éléments principaux de la réponse de stress sont l’axe hhs et le système sam, et aussi bien les taux plasmatiques de glucocorticoïdes que les changements de comportement ont été utilisés pour mesurer le stress. Le stress apparaît quand les demandes environnementales excèdent la capacité d’adaptation de l’organisme, surtout quand l’animal perçoit une situation déterminée comme étant imprévisible et peu contrôlable. Les facteurs de stress ont un caractère additif et par conséquent des situations comme le sevrage ou le transport sont susceptibles de provoquer des réponses de stress intense chez les animaux.


RÉFÉRENCES

  • Cannon WB 1929 Bodily changes in pain, hunger, fear and rage : an account of recent researches into the function of emotional excitement. Appleton, New York.
  • Selye H 1936 A syndrome produced by diverse nocuous agents. Nature 138 : 32-33.
  • Broom DM et Johnson KG 1993. Stress and Animal Welfare. Chapman & Hall, Londres.
  • Koolhaas JM, Bartolomucci A, Buwalda B, de Boer SF, Flügge G, Korte SM, Meerlo P, Murison R, Olivier B, Palanza P, Richter-Levin G, Sgoifo A, Steimer T, Stiedl O, van Dijk G, Wöhr M, Fuchs E 2011 Stress revisited : A critical evaluation of the stress concept. Neuroscience and Biobehavioral Reviews 35, 1291-1301.

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